La troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE III) apporterait de nouveaux privilèges et astuces fiscales pour les entreprises et les actionnaires. Les pertes fiscales se chiffreraient, au minimum, à 2,7 milliards de francs par an, et la facture serait adressée directement aux contribuables « normaux ». Le fruit de cette réforme étant un échec total et les coûts bien trop élevés, « l’appel à la défense de la classe moyenne a tenu, aujourd’hui, une conférence de presse à Berne pour inviter la population à voter NON à la RIE III.

Le parlement a transformé le projet initial de la RIE III élaboré par le Conseil fédéral en un festival de déductions fiscales en y intégrant tous les privilèges et souhaits particuliers émis. Les pertes fiscales se chiffreront, au minimum, à 2,7 milliards de francs par an, soit 1,3 milliard pour Confédération, et 1,4 milliard pour les cantons, les villes et les communes. Pour Prisca Birrer-Heimo, spécialiste socialiste des questions économiques, « la RIE III est une boîte noire et ses coûts réels sont impossibles à déterminer. Le Conseil fédéral s’est trompé de plusieurs milliards lors de la seconde réforme, évitons un nouveau réveil douloureux ».

Les conséquences financières seront reportées sur les villes et les communes. Pour la seule ville de Zurich, la RIE III entraînera des pertes de 300 millions de francs annuels. Une ville de taille moyenne, telle que Bienne, accuserait une perte de 15 millions de francs par an, soit près de 17% de ses entrées fiscales. Silvia Steidle, directrice des finances (PLR) de la ville de Bienne, a ainsi donné quelques exemples de conséquences concrètes de la RIE III : « des lignes de bus devront être supprimées, la piscine couverte fermée, le nombre d’élèves par classe augmenté ou les budgets culturels amputés ». Cette réforme n’est pas supportable, raison pour laquelle, un nouveau projet de réforme doit être travaillé.

Les coupes dans la formation seraient particulièrement douloureuses et totalement contre-productive pour la Suisse. Ainsi, Samuel Rohrbach, président du Syndicat des enseignants romands (SER), met en garde avec insistance, sur les conséquences irréversibles de la RIE III : « la formation est le pilier du bien-être suisse. Les entreprises internationales peuvent profiter d’une main d’œuvre particulièrement qualifiée en Suisse. Le niveau de formation est au moins aussi important dans le choix du lieu d’implantation d’une entreprise que le niveau de sa fiscalité. Couper dans l’éducation aurait des conséquences négatives pour de nombreuses années encore ».

Franziska Peterhans, secrétaire centrale de l’organisation faîtière des enseignant-e-s de Suisse (LCH) nous renvoie à la situation difficile des cantons suisses-alémaniques : « Lucerne a ordonné une semaine de vacances supplémentaire pour les écoles secondaires et professionnelles pour de purs motifs financiers. Dans les faits, le canton a déjà par deux fois, depuis 2008, divisé les impôts des entreprises par deux, se privant ainsi des ressources nécessaires. A Berne, décision a été prise d’augmenter le nombre d’élèves par classe et de réduire le programme de « soutien aux talents ». Divers cantons ont décidé de supprimer les cours par demi-classes ». Il est difficile de faire plus impopulaire que des coupes dans la formation, comme l’a démontré la grande manifestation qui s’est tenue dans le canton d’Argovie, où plus de 8’000 personnes sont descendues dans la rue.

A rappeler également que les Eglises sont également touchées de plein fouet par le projet RIE III. Le pasteur zurichois Res Peter a ainsi expliqué que l’Eglise réformée de la ville de Zurich risquait des pertes de 10 millions de francs annuels. Sur le plan légal, cet argent, provenant des entrées liées à l’imposition des entreprises, ne peut pas être utilisé pour des activités liées au culte. Cependant, « l’argent manquerait également pour des activités sociales : les tables de midi, l’aide ou les foyers d’urgence. Les personnes les plus démunies subiront cette réforme de plein fouet », a encore précisé Res Peter.